Cancer Pulmonaire Canada

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Archie Stewart

J’ai un cancer du poumon en phase terminale, un cancer de la vessie, une BPCO, une ICC et du diabète, tous (sauf le diabète) probablement causés par le tabagisme; mais on me dit que je n’ai pas « l’air » malade du tout.

À l’exception d’un combat en 1995 contre un cancer du poumon que j’ai ignoré avec arrogance, je n’ai reçu aucun autre diagnostic de cancer jusqu’en 2009, après avoir arrêté de fumer.

J’ai fumé pendant environ 45 ans : de 1962-1963 (j’avais environ 12 ou 13 ans) à janvier 2008. Pendant les premières années, fumer était agréable. C’était « cool » de fumer. Ensuite, c’est devenu une habitude, puis une véritable dépendance que je n’arrivais pas contrôler. Enfin, c’est devenu un poids et j’ai eu honte de fumer.

Ma mère est décédée en 1969 à 49 ans d’un cancer du poumon, et mon frère en 2013, à 52 ans. Tous deux fumaient. Je n’ai jamais associé le tabagisme de ma mère à son décès durant les 26 années qui se sont écoulées entre son décès et mon diagnostic de cancer. Lorsque j’ai reçu mon diagnostic de cancer du poumon en 1995, le mur mental que j’avais construit entre le cancer et le tabagisme mesurait trois mètres de haut et un mètre d’épaisseur. Je n’avais tout simplement pas associé le cancer au tabagisme. Je pense qu’au fond de moi, je le savais; mais mon cerveau, altéré par la drogue, ne me laissait pas voir la vérité. Oui, j’ai bien dit, mon cerveau altéré par la drogue – la nicotine est une drogue qui a modifié mes processus de pensée.

J’ai essayé d’arrêter de fumer probablement plusieurs fois dans les années 60, des dizaines de fois dans les années 70 et 80 et plusieurs dizaines de fois dans les années 90 et au début des années 2000, mais je n’ai jamais réussi à tenir plus de quelques jours. J’ai sérieusement « commencé à arrêter » de fumer vers 1985. Il m’a fallu plus de 20 ans pour enfin venir à bout de mon combat contre ce dragon. Ma famille, mes amis et les médecins m’ont soutenu chaque fois j’ai essayé d’arrêter, mais je pense qu’ils savaient que je n’y parviendrais pas; alors j’ai cessé de leur dire que j’essayais d’arrêter parce que je ne voulais pas qu’ils sachent que j’avais encore échoué.

Pour que vous compreniez à quel point l’envie de fumer est forte ou que la dépendance à la nicotine est difficile à briser, je dois vous en dire un peu plus sur moi. À la fin de mon adolescence, de mes vingt ans au début de la trentaine, avant que mon corps ne commence à ressentir les ravages et les effets secondaires graves du tabagisme, j’étais assez robuste. Je mesurais 1,83 m et pesais 90 kilos. J’ai joué au rugby et au football à l’université. Je pouvais courir huit kilomètres en moins de 30 minutes en portant un sac à dos de 20 kilos. J’ai sauté d’avions en parfait état à 10 000 m d’altitude – exprès. J’ai servi au Vietnam. J’ai été poignardé, abattu et battu. Aucune de mes forces ne jouait face à une cigarette et à mon désir d’arrêter de fumer. J’étais incapable de résister à mon envie d’une cigarette.

Je n’ai jamais fumé à la maison parce que je pense qu’au fond de moi, je connaissais les effets de la fumée secondaire, alors je sortais fumer. Peu importe où et quand, tout ce qui comptait, c’était la nicotine. Au Koweït à +45 °C, à Moscou à -45 °C, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige, dans les pires tempêtes, je sortais fumer. Une nuit, je me suis réveillé à deux heures du matin et je suis sorti en pleine tempête de neige. Il faisait -20 °C, la neige voltigeait autour de moi, le vent soufflait à 80 kilomètres à l’heure. J’étais là, debout, avec de la neige jusqu’aux genoux, en pantoufles et aussi nu que le jour de ma naissance sous mon manteau qui claquait derrière moi comme la cape de Superman. Pourtant, j’ai tenu dehors cinq minutes par ce temps glacial; mes orteils et mes doigts étaient bleus de froid, mais j’ai attendu d’avoir fini ma cigarette pour rentrer. Je me sentais bien parce que j’avais fumé.

Ce qui était bien pire que de nuire à ma propre santé était de m’en prendre verbalement à mes proches lorsqu’ils me demandaient de faire quelque chose qui allait me prendre cinq minutes, tout simplement parce que je n’avais pas fumé depuis 15 minutes et qu’attendre cinq minutes de plus serait synonyme d’agonie.

C’est dire la force de la dépendance.

En 1995, on m’a diagnostiqué un cancer du poumon et l’on m’a retiré une partie de mon lobe inférieur droit, grande comme une part de tarte. Tout est allé très vite – la radiographie du mercredi, le diagnostic le jeudi matin, la rencontre avec le chirurgien le jeudi après-midi, l’hospitalisation le dimanche matin et l’opération le lundi matin à 8 heures. Je me suis réveillé lundi après-midi. Je me souviens avoir été surpris que mon dos me fasse mal, pas l’avant de mon corps. Qui aurait pensé qu’une opération des poumons se faisait dans le dos? Je déteste les hôpitaux et j’ai immédiatement commencé à faire pression pour en sortir. Le samedi matin suivant, j’ai été libéré et on m’a dit de ne rien faire pendant quelques semaines. Dimanche matin, j’ai repeint mon bureau. Je n’avais pas fumé depuis près de 10 jours et je me suis dit que peut-être, peut-être, j’avais perdu l’habitude pour de bon. C’était l’une des plus longues périodes sans cigarette. Le mardi suivant, soit 13 jours après mon diagnostic, alors que je conduisais de Sydney à Dartmouth pour une réunion, cédant à la tentation, j’ai acheté un paquet de cigarettes à Saint-Pétersbourg. J’en ai fumé une demi-douzaine avant d’arriver à Antigonish, une distance d’environ 100 km. Dégoûté de moi-même, j’ai jeté mes cigarettes, mes allumettes, mes briquets de voiture et tous les cendriers, une fois arrivé à Antigonish. Je me suis rendu à New Glasgow, à environ 50 kilomètres, et j’ai acheté un autre paquet de cigarettes. Le dragon avait gagné. Je n’ai jamais remplacé les cendriers ou les briquets de ma Cadillac.

Pendant environ cinq ans, le chirurgien thoracique qui m’avait opéré du poumon m’a fait passer des examens. Au début, ces examens étaient hebdomadaires, puis bihebdomadaires, mensuels, tous les trois mois, six mois et enfin, tous les ans. Souvent, le médecin était accompagné d’un ou de deux résidents plus jeunes. Fin 1995, lors d’un examen, j’ai surpris une conversation, derrière un rideau, entre mon chirurgien et un jeune résident qui disait : « … mais le type de cancer qu’il a n’est pas causé par le tabagisme ». Le chirurgien lui avait répondu : « Chut, nous ne voulons pas qu’il le sache. » Ce n’est peut-être pas le contenu exact de leur conversation; mais ce que j’ai entendu, c’est que je pouvais encore fumer parce que mon cancer n’était pas causé par le tabagisme. Il a fallu encore cinq ans avant que je pense à arrêter de nouveau. Donc, avis aux professionnels de la santé : faites attention à ce que vous dites et quand vous le dites – vous ne savez jamais qui pourrait vous entendre.

J’ai finalement réussi à arrêter de fumer en janvier 2008.

Après plusieurs mois, le « désir » de fumer n’était plus là et un jour de janvier 2009, j’ai posé mes cigarettes et je n’en ai plus jamais repris. J’avais enfin tué le dragon.

Vers la fin de 2009, j’ai reçu un nouveau diagnostic de cancer du poumon, cette fois dans le lobe supérieur droit, une masse ovale d’environ 2,5 cm de long. En 2010, le chirurgien m’a dit que mon cancer était en phase terminale et qu’à son avis, il me restait trois à cinq ans à vivre. En 2013, un deuxième médecin m’a confirmé que le cancer était bien en phase terminale, mais il ne pouvait pas me prédire le temps qu’il me restait à vivre. En octobre 2014, on m’a informé que le cancer était toujours là, toujours en phase terminale, mais bonne nouvelle, il n’avait pas augmenté au cours de l’année écoulée. Mon diagnostic suivant était deux ans plus tard, en septembre 2016. Un chirurgien thoracique a regardé des radiographies datant d’une semaine et m’a dit que le cancer n’avait augmenté que de quelques millimètres par rapport à celles d’il y a deux ans, ce qu’il disait être bon signe. Mais la mauvaise nouvelle était qu’il avait atteint mes ganglions lymphatiques et qu’il y avait une petite tache de 2 mm dans mon poumon droit qu’il devait surveiller de près. Il m’a également expliqué que ce qui correspondait à une phase terminale il y a sept ans pouvait ne plus être valide aujourd’hui. Donc, depuis ce jour, je vis ma vie comme si je n’avais pas une date d’expiration estampillée sur mon front.

Côté positif, je fais partie des 17 % de personnes qui ont reçu un diagnostic de cancer en phase terminale et qui survivent plus de cinq ans. J’espère atteindre les huit ans et battre le record. Je pense souvent aux 83 % de patients restants. Je connais le combat qu’ils ont courageusement mené, surtout en silence, y compris celui de ma mère et de mon frère de 52 ans.

Je n’ai jamais vraiment été « traité » pour ce cancer du poumon. Quelques consultations par des médecins qui ont examiné des radiographies, des IRM ou des tomodensitogrammes, puis qui m’ont dit que j’avais un cancer en phase terminale. Une tentative de biopsie a échoué après une demi-douzaine d’essais et la zone visée est devenue trop imprégnée de sang pour voir la tumeur au tomodensitomètre. Je n’ai jamais reçu de chimiothérapie ou de radiothérapie et, en toute honnêteté, les deux me font peur. On me dit que l’un des effets secondaires de ces deux traitements est la chute des cheveux. C’est vraiment effrayant. Imaginez de quoi j’aurais l’air, chauve.

Une autre conséquence associée au tabagisme est mon cancer de la vessie, diagnostiqué il y a environ quatre ou cinq ans. Je fais une cystoscopie tous les trois mois et des grattages tous les neuf mois environ lorsque des tumeurs sont trouvées. Au nombre des cadeaux offerts par les cigarettes, je dois mentionner la BPCO, l’ICC et le diabète. Étonnamment, je pense que la BPCO me tuera bien avant le cancer. Certains jours, je ne peux tout simplement pas respirer. À cause du tabagisme, je dois suffoquer dans mon propre corps pour les prochaines années.

Pour arrêter de fumer, j’ai tout essayé : les timbres antitabagiques, les gommes à mâcher, les pilules, le sevrage brutal, l’hypnose et l’acupuncture. Rien n’a marché. J’ai découvert par moi-même une pilule nommée Champix. Je pense que j’ai vu une publicité sur une chaîne de télévision américaine et que la liste des effets secondaires possibles durait au moins deux minutes, ce qui m’a un peu effrayé, mais je me suis dit : pourquoi pas? J’avais essayé toutes les autres méthodes pour arrêter de fumer, qu’est-ce que je perdais à essayer celle-là aussi; en outre, les effets secondaires ne pouvaient pas être pires que ceux de la cigarette.

Après vérification, j’ai découvert que Champix était disponible au Canada avec une ordonnance que mon médecin m’avait volontiers rédigée; j’étais heureusement surpris d’apprendre qu’il était couvert par le régime d’assurance maladie de la société pour laquelle je travaillais. J’ai commencé à prendre ces comprimés vers octobre 2008 et j’ai continué à fumer. Après plusieurs mois, le « désir » de fumer n’était plus là et un jour de janvier 2009, j’ai posé mes cigarettes et je n’en ai plus jamais repris. J’avais enfin tué le dragon.

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